LOT 015

AUTO CAS OC QMG RCA SCA
1923 - 2002
Canadien

Sans titre
huile sur toile
signé et au verso daté 1962 sur l'étiquette de la Galerie Dresdnere, inscrit « Laing » sur l’étiquette d’expédition Arthur Lenars & Cie., Paris et avec le numéro d’inventaire Laing #1408 et étampé Douane Centrale, Exportation Paris
28 1/2 x 39 po, 72.4 x 99.1 cm

Estimation : 250 000 $ - 350 000 $ CAD

Vendu pour : 397 250 $

Exposition à :

PROVENANCE
Acquis directement de l’artiste à Paris par G. Blair Laing, Toronto, vers 1962
Laing Galleries, Toronto
Carl Grant, Toronto
Galerie Dresdnere, Toronto
Collection privée, Toronto
Art canadien d’après-guerre et contemporain, Maison de vente aux enchères Heffel, 25 novembre 2010, lot 56
Acquis du susmentionné par une importante collection privée, Montréal

BIBLIOGRAPHIE
Karen Wilkin, The Automatists: Then and Now, Galerie Dresdnere, 1986, reproduit, non paginé
Yseult Riopelle, Jean-Paul Riopelle Catalogue Raisonné, Volume 3, 1960 - 1965, 2009, reproduit page 157, catalogue #1962.022H. V1962

EXPOSITION
Galerie Dresdnere, Toronto, The Automatists: Then and Now, 1er - 21 mai 1986, catalogue #41


Il est parfois possible de reconstituer l’historique complet d’un tableau en consultant les informations qui se trouvent au dos. Ainsi, au verso de cette œuvre sans titre de Jean Paul Riopelle est collée une ancienne étiquette d’Arthur Lenars, un transporteur parisien auquel avait également recours Paul-Émile Borduas. On y lit le nom « Laing » en grosses lettres; il s’agit du marchand d’art Blair Laing qui avait pris l’habitude de visiter les ateliers des artistes canadiens installés à Paris. C’est à cette époque qu’il a acquis le tableau, directement auprès de Riopelle. Une autre étiquette, provenant cette fois de la Galerie Dresdnere de Toronto, mentionne l’année 1962. Il est avéré que ce tableau a fait partie de l’exposition « The Automatists Then and Now » qui y a été organisée en mai 1986 et a même été reproduit dans le catalogue publié à cette occasion. C’est ce qu’on peut qualifier de provenance solide ! Mais qu’en est-il du recto de Sans titre ?

Dans les années 1960, Riopelle a considérablement transformé son style mosaïque typique de la décennie précédente. Comme le montre ce Sans titre, les coups de couteau ne sont plus égaux ni orientés de manière prévisible et semblent beaucoup plus libres, chaotiques et impulsifs, comme si l’ensemble de la composition renversait une tendance pour être plus informelle. Le résultat est plus émouvant, car il donne l’impression que l’artiste a pris d’innombrables risques en élaborant son tableau. La composition conserve une allure de paysage, mais aussi celle d’une catastrophe. On perçoit un éclatement des structures dû à des forces mystérieuses cachées, comme lors d’un tremblement. En revanche, ici, la couleur sauve tout. Le blanc et le rouge, en particulier, imposent un certain ordre.

Il convient de souligner l’importance qu’a eue pour Riopelle la découverte des tableaux tardifs de Claude Monet. Contrairement à Pablo Picasso, qui accordait toujours une place prépondérante à la forme, Monet, à la fin de sa vie, était en train de perdre la vue (il souffrait de cataractes et se méfiait de toute opération aux yeux) et se battait avec la peinture, avec la matière. Ses dernières toiles sont souvent peu lisibles, même si on sait qu’elles représentent toutes des aspects de ses jardins de Giverny. Parce qu’elles sont presque abstraites, elles ont beaucoup plu à des peintres abstraits comme Riopelle, Joan Mitchell et leurs amis américains.

Riopelle n’a jamais oublié cette leçon. En peignant avec la spatule, il introduisait, sinon une sorte d’aveuglement dans le processus de peinture, du moins des instants successifs d’occultation suivis de moments de révélation. Je parle ici de la technique même de l’étalement de la matière à l’aide d’un couteau où on cache l’effet au moment même où on le produit. En travaillant de cette manière, Riopelle a dû accorder une place centrale à la matière qui est devenue de plus en plus prégnante dans œuvre.

Le plaisir de peindre consistait à extraire de la matière informe, sinon un certain ordre, du moins une impression de mouvement, de direction et d’énergie irrépressible. En suivant du regard les accents rouges de ce Sans titre, on ressent la maîtrise que le peintre avait sur la totalité de la surface. Chez Riopelle, le contrôle conscient n’est jamais le contraire de la liberté d’expression, voire du danger. Au contraire, c’est lorsque le danger est à son paroxysme que le contrôle conscient s’exerce le mieux. Il va sans dire que chaque tableau exigeait un engagement total de sa part et pouvait être réalisé en une seule séance d’intense conscience de ce qui se passait sur la toile. Le résultat, quoique toujours surprenant, est indéniablement un authentique Riopelle.

Nous remercions feu François-Marc Gagnon, de l’Institut d’études en art canadien Gail et Stephen A. Jarislowsky de l’Université Concordia, qui a rédigé l’essai ci-dessus en 2010.


Estimation : 250 000 $ - 350 000 $ CAD

Tous les prix affichés sont en dollars canadiens


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